Mise à jour 7 février 2025
Suspension de l’abaissement du seuil d’exemption de TVA pour les micro-entrepreneurs
Le gouvernement a annoncé la suspension de la mesure visant à abaisser, dès le 1er mars 2025, le seuil d’exemption de TVA des micro-entrepreneurs à 25 000 euros de chiffre d’affaires annuel (contre 37 500 euros jusque-là pour les prestations de services). Votée dans le budget 2025 et adoptée ce jeudi au Parlement, cette disposition n’entrera pas en vigueur dans l’immédiat.
Le ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Éric Lombard, a justifié cette décision par la nécessité de « concertation » et de « dialogue ». Les « six ministres de Bercy » consulteront prochainement les parties prenantes afin d’« ajuster » la réforme si besoin. D’ici là, les auto-entrepreneurs ne seront pas tenus de s’inscrire pour payer la TVA et conservent donc l’exonération actuelle (jusqu’à 37 500 euros pour les prestations de services et 85 000 euros pour les activités commerciales).
Le 1ᵉʳ mars 2025, les règles fiscales des micro-entrepreneurs connaîtront un changement majeur avec l’abaissement du seuil de franchise de TVA à 25 000 €. Cette réforme, intégrée au projet de loi de finances 2025 et adoptée sans vote via l’article 49.3, met fin à la distinction entre les seuils appliqués aux prestations de services et aux activités de commerce.
Jusqu’à présent, les micro-entrepreneurs pouvaient exercer sans facturer la TVA tant qu’ils ne dépassaient pas 37 500 € de chiffre d’affaires pour les services et 85 800 € pour la vente de marchandises. Avec cette nouvelle limite unique, de nombreux indépendants devront désormais intégrer la TVA dans leur facturation, une obligation qui risque d’affecter directement leur compétitivité et leur rentabilité.
Cette mesure suscite des réactions contrastées. Tandis que le gouvernement justifie cette décision par une volonté d’harmonisation fiscale et de réduction des distorsions de concurrence, les micro-entrepreneurs s’inquiètent des répercussions sur leur activité, notamment face à une clientèle non assujettie à la TVA.
👉 Pourquoi cette réforme inquiète-t-elle autant ?
👉 Quels sont les impacts concrets pour les micro-entreprises ?
👉 Comment anticiper et s’adapter à cette nouvelle règle ?
Cet article décrypte tout ce que vous devez savoir sur ce changement et vous livre 5 stratégies pour mieux gérer cette transition fiscale.
Comprendre la réforme : ce qui change en 2025
Traditionnellement, les micro-entrepreneurs pouvaient bénéficier de la franchise en base de TVA tant que leur chiffre d’affaires restait sous certains seuils. Ces seuils variaient en fonction de l’activité exercée, avec un plafond à 37 500 €pour les prestations de services et à 85 800 € pour les activités de vente de biens.
À partir du 1ᵉʳ mars 2025, la réforme introduite par l’article 10 du Projet de Loi de Finances (PLF) 2025 instaure un seuil unique de 25 000 € applicable à toutes les activités de micro-entreprises. Cette modification marque la fin des distinctions entre activités de services et de commerce, simplifiant ainsi les règles fiscales.
Voici les seuils applicables dès 2025 :
Type d’activité | Seuil de franchise (année civile précédente) | Seuil majoré (année en cours) |
---|---|---|
Toutes les activités | 25 000 € | 27 500 € |
Quelques précisions sur les seuils :
- Seuil de franchise : Si le chiffre d’affaires de l’année précédente est inférieur à 25 000 €, l’entreprise reste exonérée de TVA.
- Seuil majoré : Si le chiffre d’affaires dépasse 25 000 €, mais reste inférieur à 27 500 €, la TVA devient applicable dès le 1ᵉʳ janvier de l’année suivante.
- Dépassement en cours d’année : Si le chiffre d’affaires dépasse 27 500 €, l’entreprise devient immédiatement soumise à la TVA dès le jour du dépassement.
Conséquences directes pour les micro-entrepreneurs :
Impact sur la compétitivité, notamment pour ceux travaillant avec des clients non assujettis à la TVA (particuliers, associations).
Obligation de facturer la TVA à un taux de 20 % en métropole (8,5 % en Outre-mer).
Gestion administrative alourdie : dépôt de déclarations de TVA, mise à jour des factures, et suivi rigoureux des obligations fiscales.
Pourquoi cette réforme ?
Le gouvernement justifie cette mesure par la volonté de réduire la distorsion de concurrence entre les micro-entrepreneurs et les autres entreprises. Jusqu’à présent, l’exonération de TVA offrait un avantage tarifaire significatif aux indépendants travaillant avec des particuliers et des structures non assujetties à la TVA.
Toutefois, cette décision soulève de nombreuses inquiétudes parmi les indépendants, notamment ceux dont l’activité repose sur une clientèle qui ne pourra pas récupérer cette TVA (ex : particuliers, associations, professions médicales).

Réactions et témoignages des micro-entrepreneurs
L’annonce de la baisse du seuil de franchise de TVA à 25 000 € a suscité une vive réaction parmi les micro-entrepreneurs qui s’expriment sur les réseaux comme Linkedin. Pour beaucoup, cette réforme représente un bouleversement de leur modèle économique et une remise en question de leur rentabilité.
Yann Ruebrecht, coach et accompagnateur entrepreneurial, évoque une décision qui risque de fragiliser de nombreux indépendants. Selon lui, les auto-entrepreneurs devront choisir entre augmenter leurs prix ou réduire leurs marges, une équation difficile dans un contexte économique déjà tendu. “Les prix pratiqués par les auto-entrepreneurs vont devoir augmenter, ou ils vont s’appauvrir, au choix”, affirme-t-il.
La brutalité du changement est également pointée du doigt par Guillaume Dupont, consultant en communication digitale, qui dénonce une décision prise sans concertation. “Le gouvernement vient de faire passer en force une mesure qui change tout : moins de revenus, plus de charges et une pression fiscale encore plus forte.” Il s’inquiète des conséquences sur la compétitivité des micro-entrepreneurs, en particulier ceux qui travaillent avec des particuliers et ne peuvent pas répercuter la TVA sur leurs prix.
Cette problématique est illustrée par Pierre André, co-fondateur de Wecasa, qui met en avant l’exemple de Nadia, coiffeuse à domicile. Jusqu’ici, elle générait 2 100 euros nets par mois. Avec cette réforme, si elle ne modifie pas ses tarifs, son revenu mensuel chutera à 1 700 euros. Une perte de 400 euros par mois, soit près de 5 000 euros par an. “C’est un séisme qui est pourtant passé inaperçu jusque-là dans la presse”, souligne-t-il.
Face à cette réforme, certains appellent à une mobilisation tandis que d’autres préfèrent anticiper dès maintenant l’application de la TVA. Myriam Tissot, juriste indépendante, encourage les micro-entrepreneurs à vérifier dès maintenant leur chiffre d’affaires et à anticiper l’impact sur leurs prix.
Les réactions sont unanimes : cette réforme impose un changement profond dans la gestion des micro-entreprises. Pour beaucoup, il ne s’agit plus seulement d’une évolution fiscale, mais d’une remise en cause du modèle même du micro-entrepreneuriat.

Quels impacts concrets sur les micro-entreprises ?
Avec l’abaissement du seuil de franchise de TVA à 25 000 euros, de nombreux micro-entrepreneurs vont devoir intégrer cette taxe dans leur gestion quotidienne. Cette réforme pose une problématique centrale : comment absorber la TVA sans perdre en rentabilité ni en compétitivité ?
Deux scénarios possibles : répercuter ou absorber la TVA
Lorsqu’un micro-entrepreneur franchira le seuil de 25 000 euros, il sera contraint d’appliquer la TVA à ses clients. Deux options s’offriront alors à lui :
- Répercuter la TVA sur les prix
La première solution consiste à augmenter ses tarifs de 20 % (ou du taux applicable) pour couvrir la TVA. Cela permet de préserver sa marge et de ne pas subir de perte financière. Mais cette stratégie comporte un risque : perdre en compétitivité. Beaucoup de micro-entrepreneurs travaillent avec des clients non assujettis à la TVA, comme des particuliers, des associations ou des professions libérales. Pour eux, cette hausse de prix se traduira par une charge supplémentaire difficilement acceptable. - Absorber la TVA et réduire ses marges
L’autre solution est de ne pas modifier ses tarifs et de supporter la TVA sur ses revenus. Cette approche évite de brusquer la clientèle, mais elle entraîne une baisse directe du revenu net du micro-entrepreneur. Par exemple, un professionnel qui facture 30 000 euros par an devra reverser 6 000 euros de TVA s’il est soumis au taux de 20 %, réduisant ainsi son chiffre d’affaires net à 24 000 euros.
Un changement qui complexifie la gestion administrative
Au-delà de l’impact financier, cette réforme implique également un changement dans la gestion comptable et administrative des micro-entreprises. Jusqu’ici, le régime de la micro-entreprise était apprécié pour sa simplicité : peu de déclarations, pas de TVA à collecter, une fiscalité allégée. Désormais, les indépendants concernés devront :
- Déposer des déclarations de TVA régulières auprès de l’administration fiscale.
- Facturer avec un numéro de TVA intracommunautaire et des mentions obligatoires.
- Effectuer un suivi rigoureux pour s’assurer du bon reversement de la taxe.
Si certains outils comptables simplifient ces démarches, l’ajout de ces obligations risque de rendre le régime moins attractif, notamment pour ceux qui recherchent une gestion simplifiée.
La réforme impose donc une véritable réflexion aux micro-entrepreneurs. Ceux dont l’activité se rapproche du seuil de 25 000 euros devront anticiper ces changements dès maintenant pour éviter un passage brutal à un modèle plus contraignant.

5 stratégies pour s’adapter au nouveau seuil de TVA
Face à cette réforme, les micro-entrepreneurs doivent anticiper les changements pour éviter des difficultés financières et administratives. Voici cinq stratégies concrètes pour mieux gérer la transition et préserver la rentabilité de leur activité.
1️⃣ Suivre son chiffre d’affaires avec précision
Le dépassement du seuil de 25 000 euros déclenche immédiatement l’assujettissement à la TVA. Il est donc indispensable de surveiller son chiffre d’affaires en temps réel pour éviter une bascule imprévue.
➡ Outils recommandés : des logiciels comme Tiime permettent d’automatiser le suivi et d’envoyer des alertes en cas d’approche du seuil.
2️⃣ Anticiper l’ajout de la TVA sur ses tarifs
Si la TVA devient inévitable, il est crucial de réfléchir à son intégration dans la grille tarifaire. Deux options sont possibles :
- Augmenter les prix pour répercuter la TVA sur les clients, en expliquant clairement cette évolution.
- Rester compétitif en absorbant une partie de la TVA, tout en optimisant les coûts pour préserver sa marge.
➡ Une communication transparente avec les clients permettra de justifier la hausse des tarifs et d’éviter les incompréhensions.
3️⃣ Optimiser ses charges pour réduire l’impact financier
Être assujetti à la TVA permet également de récupérer la TVA sur ses dépenses professionnelles. Cela signifie qu’une bonne gestion des charges peut limiter l’impact de la réforme sur la rentabilité.
➡ Il est conseillé de réaliser un audit des dépenses pour identifier celles sur lesquelles la TVA peut être récupérée : matériel informatique, abonnements professionnels, frais de déplacement, formations…

4️⃣ Adapter son modèle économique pour éviter un blocage à 25 000 euros
De nombreux micro-entrepreneurs pourraient être tentés de freiner volontairement leur activité pour rester sous le seuil. Cette stratégie peut être risquée à long terme. Une alternative consiste à faire évoluer son modèle en :
- Développant des prestations à plus forte valeur ajoutée.
- Passant à un statut plus adapté (SASU, EURL) en cas de croissance stable.
- Travaillant avec une clientèle qui récupère la TVA, comme les entreprises.
➡ Se limiter volontairement à 25 000 euros de chiffre d’affaires peut freiner la croissance et réduire la rentabilité. Mieux vaut anticiper un changement de régime si l’activité évolue.
5️⃣ Se faire accompagner pour éviter les erreurs fiscales
L’assujettissement à la TVA implique de nouvelles obligations administratives et déclaratives. Pour éviter les erreurs et les pénalités, il est recommandé de se faire accompagner par un expert-comptable.
Un défi, mais aussi une opportunité ?
La baisse du seuil de franchise de TVA à 25 000 euros marque un tournant pour les micro-entrepreneurs. Si cette réforme impose de nouvelles contraintes, elle peut aussi être l’occasion de repenser son modèle économique et d’anticiper une montée en régime.
Plutôt que de subir la réforme, les indépendants doivent adapter leur stratégie : surveiller leur chiffre d’affaires, ajuster leurs tarifs, optimiser leurs charges et envisager, si nécessaire, une évolution vers un statut plus adapté.
L’essentiel est d’anticiper ces changements dès maintenant pour éviter les mauvaises surprises et assurer la pérennité de son activité.
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